Anna-Sophia ▬ La beauté du monde se trouve dans sa diversité.

« Anna, sois fière du nom que tu portes. Sois fière des origines de notre famille. Il y a très longtemps, c'est un De Woodcroft qui a bâti Pré-au-Lard. Il voulait échapper à la persécution moldue, et s'est réfugié en Écosse. C'est de là que vient notre famille. Un jour, tu te marieras. Un jour, tu perdras ce nom. Mais ne perd pas de vue nos origines. Ne perd pas de vue qui nous sommes. Quoi qu'il arrive, tu resteras pour toujours une De Woodcroft. »

Tu n'avais jamais oublié ces mots. Ceux de ton père, un jour, lorsque celui-ci avait décidé que tu étais en âge d'en apprendre davantage sur tes origines. Tu es née dans une famille sorcière, et bien que ta famille soit déclarée de sang-mêlé, ton arbre généalogique compte une grande majorité de sorciers. Tu fais partie d'une grande famille, dont les premières traces ont été retrouvées au Moyen-Âge grâce à un certain Hengist de Woodcroft, plus spécialement connu pour avoir fondé le village de Pré-au-Lard. Une famille qui, depuis, s'est agrandie, déchirée, mélangée à d'autres familles... C'est certainement pour cette raison que votre sang ne peut plus se vanter d'être pur. Mais le fait est que tu as toujours vécu dans le monde magique.

Descendante directe de Hengist de Woodcroft par ton père, et descendante d'une ancienne famille moldue s'étant progressivement changée en famille sorcière grâce à la naissance de plusieurs sorciers sur plusieurs générations du côté de ta mère, la magie a toujours fait partie de ton quotidien. A vrai dire, rien ne te destinait réellement à enseigner la culture moldue un jour, si ce n'était cette passion qui grandissait en même temps que toi pour les choses que tu ne comprenais qu'à peine. Le monde moldu te sembla fascinant à la seconde où tu eus conscience de son existence, et cette fascination ne te quitta jamais. Une fascination que ton père ne comprit jamais, et qui fut la cause de nombreuses altercations entre vous. Votre relation avait toujours eu cette particularité d'être à la fois absolument fusionnelle, et remplie d'une incompréhension la plus totale.

Ton enfance fut charmante, et bienheureuse. Aucun drame familial pour venir entacher le bonheur de votre famille, si ce n'était une rivalité entre ta fausse jumelle et toi-même. Maria-Sophia et toi étiez toujours en compétition, sur tout. Elle voulait être la plus aimée par vos parents, tu voulais être celle qui parviendrait à les rendre fière, et vos chamailleries constantes était finalement une animation attendrissante aux yeux de votre père et de votre mère. Cependant, cette rivalité n'allait pas assez loin pour que cela ai trop de répercussions sur votre enfance. Ce fut au début de votre scolarité que les choses se compliquèrent un peu. Vous étiez terriblement différentes. Si physiquement, il était assez simple de vous confondre, bien que votre ressemblance n'était pas parfaite, psychologiquement c'était une toute autre histoire. Tu fus envoyée à Poufsouffle, en digne héritière du nom des Woodcroft tandis que Maria-Sophia fut envoyée à Serpentard. Tu étais honnête, lorsqu'elle était manipulatrice. Tu étais loyale, lorsqu'elle se montrait opportuniste. Tu étais impulsive, lorsqu'elle savait faire preuve d'un grand esprit d'analyse. Tu étais en retrait, lorsqu'elle savait être populaire. Tu aimais les moldus, tandis qu'elle apprenait à les haïr.

Ta scolarité fut marquée par les méchancetés perpétuelles de ta sœur et de sa bande d'amis à ton égard. Les trois premières années furent difficiles pour toi, Maria-Sophia s'amusant alors à appuyer sur ta confiance en toi jusqu'à la détruire. Tu longeais les murs, baissait la tête, n'osait même pas te faire d'amis tant ta sœur parvenait à te convaincre que tu n'en méritais pas. Il était difficile de te construire, dans ces conditions, et tu avais bien trop honte pour oser en parler à tes parents. Jusqu'au jour où tu fus tout simplement poussée à bout tellement violemment que tu fus incapable de rester passive. Ta sœur s'amusait encore à t'humilier publiquement, sous quelques rires et murmures moqueurs. Et ce jour là, tu avais prouvé à toute l'école que tu étais une digne Poufsouffle. Plutôt que de te laisser faire, tu avais contre-attaqué avec le sort le plus puissant que tu connaissais. Maria-Sophia se retrouva à l'infirmerie pendant deux semaines, et tu te retrouvas exclue de Poudlard pour la même durée. Bien entendu, tu fus forcée de dire la vérité à tes parents, et ils vous punirent toutes les deux sur un pied d'égalité, quoi que ton père fut un peu plus dur avec Maria-Sophia qu'il ne le fut avec toi.

A partir de cet instant, ton quotidien fut différent. Il n'y avait plus grand monde pour tenter de te rabaisser, maintenant que tous savaient que tu étais en mesure de te défendre. Et tu te fis même des amis. La fin de ta scolarité fut plutôt douce, tu en profitas pour t'intéresser encore davantage à la culture moldue que tu finis par connaître sur le bout des doigts. Tu obtins tes BUSE, puis tes ASPIC avec des Optimaux en Étude des Moldus et ce fut assez naturellement que tu décidas de te tourner vers l'enseignement. Tu avais toujours vu en tes professeurs des hommes et des femmes admirables et inconsciemment, sans oser te l'avouer à toi-même, tu espérais un jour être admirée de la même façon. Tu travaillas très dur pour mener à bien tes projets, t'oubliant un peu dans tout cela. Des petits-amis ? Tu n'en eus que deux, un en quatrième année dont tu ne te souviens même pas du prénom. Et un homme avec lequel tu vécu une histoire qui dura huit ans, après que vous vous soyez rencontrés chez des amis communs à 19 ans. Vous vous étiez fiancés, vous aviez des projets... Tu l'aimais, bien sûr, mais ton projet professionnel te semblait bien plus important que ta vie amoureuse, et tu le délaissa. Tu ne remarquas même pas lorsqu'il commença à s'éloigner, puis lorsqu'il commença à rentrer de moins en moins chez vous, et ce fut un coup de massue lorsqu'il te quitta. Pourtant, tout votre entourage se doutait que votre histoire n'allait pas durer. Il n'y avait que toi pour ne pas le voir.

Tu vivais alors comme dans une bulle. Tellement plongée dans ton projet professionnel que tu en avais oublié de voir ta famille se déchirer. Ta sœur était partie. Ton père était effondré. Ta mère, dévastée. Et ta peine de cœur te parut un grain de poussière face à leur détresse. Tu ne comprenais pas pourquoi Maria-Sophia était partie. Tu ne comprenais pas comme elle avait pu faire ça à vos parents. Et tu réalisas que, d'une certaine façon, tu avais fait la même chose. Tu eus l'impression d'avoir loupé tant de choses que le retour à la réalité fut d'une violence inouïe. A 27 ans, tu eus l'impression que tout s'effondrait. Pourtant, ce fut en Septembre de cette année là que tu pris ton poste de professeur d'étude des Moldus pour la première fois à Poudlard. Tu t'étais tellement convaincue que c'était tout ce qu'il te fallait pour être heureuse que tu fus profondément dévastée de te rendre compte que ce n'était pas le cas.

Depuis, tu te réfugies dans le travail. Tu donnes tout ce que tu peux donner à tes élèves. C'est aujourd'hui ta deuxième année en tant que professeur d'étude des moldus, et tu prend ton rôle très à cœur. Tu ignores toujours que ta sœur a rejoint les rangs des Mangemort, et tu essaies d'inculquer comme tu peux à tes élèves à ne pas se laisser sombrer dans la peur ou dans la haine des moldus. Le monde d'aujourd'hui t'effraie, mais tu fais tout pour garder ton sourire. Pour réapprendre, également, à ne plus mettre de côté ta vie personnelle.