[Hermione] Une rencontre dans le passé pour parler du présent qui se trouve être le futur

Exceptionnellement, certains élèves de Poudlard avaient eu le droit d’aller à l’Université afin de découvrir le campus, mais également de choisir la filière qui leur conviendrait le mieux. Au programme, une présentation des différents cursus proposés ainsi que de l’Université (son histoire, son fonctionnement, etc.) suivie par une visite donnée par des anciens élèves, puis retour à Poudlard afin de retourner travailler pour ses examens et remplir les dossiers nécessaires.
Et aussi étrange que cela puisse paraitre, Isidore faisait partie des quelques étudiants qui profitaient de cette découverte du cursus universitaire. Pourquoi ? Lui-même ne le savait pas exactement. Pour échapper aux révisions intensives et stressantes de tous les autres Serdaigles, probablement. Pour espérer trouver sa vocation, vaguement probable. Pour savoir s’il avait envie de quitter Poudlard et si ça valait la peine de réviser, vraiment, ses ASPICS, plus probable.
Alors il avait joint l’expédition, avait distraitement écouté les présentations, se demandant s’il se voyait vraiment continuer à étudier. Il avait longuement rêvassé, savourant la chaleur du lieu, si différente de celle de Poudlard qui demeurait fraîche même l’été. Puis était venue l’heure des visites, et il avait attendu, comme demandé par le responsable de leur « initiation », devant l’imposante porte qui menait aux jardins.
Et il patientait encore.
Il avait entendu certains Gryffondors chuchoter et croiser les doigts quant à l’identité de leurs guides personnels. Ces visites effectuées en petits nombres avaient pour but de leur permettre de vraiment se mettre dans la peau des étudiants, d’être en contact direct avec eux et de pouvoir leur poser discrètement toutes les questions qu’ils désiraient, et visiter certains endroits précis du campus. Isidore, quant à lui, n’espérait pas grand-chose et ne comptait pas vraiment parler à son guide, il ne se sentait toujours pas à place dans cette année, et ne voyait pas comment aller à l’université allait changer les choses.

Isidore se mêla au petit groupe autour de leur guide et fronça les sourcils lorsque la jeune fille se présenta. Si son visage lui semblait familier, il savait désormais pourquoi. C’était Hermione Granger. Celle qui lui avait offert un voyage dans le temps sans billet de retour.
Il sentit l’agacement le gagner et malgré son habitude à étouffer tous ses sentiments, il ne le refoula pas. La jeune fille était assurée et termina rapidement son petit discours d’introduction, leur expliquant le fonctionnement du début de leur visite. Puis, après avoir parcouru du regard son petit groupe studieux, personne ne parlait et Isidore en était soulagé, il n’avait pas envie de s’attarder ici. Le fait de la revoir, elle, ne le mettait pas dans de meilleures conditions pour comprendre ce qu’il allait bien pouvoir faire de sa vie.
Il sentit le regard chocolaté d’Hermione s’attarder quelques secondes supplémentaires sur sa personne, sans qu’elle ne réagisse. Savait-elle qui il était ? C’était peu probable, toutefois, après leur avoir donné une demi-heure de liberté elle s’approcha de lui.
Il n’avait pas bougé et ne comptait pas vraiment aller fureter du côté du forum. Esprit de contradiction.

« Salut… »

Isidore serra les dents. Elle semblait donc décidée à discuter avec lui.. Voilà qui n’arrangeait pas les choses. Toutefois, la bienséance inculquée par sa mère ne lui permit pas de l’ignorer et de tourner les talons. Il la regarda alors droit dans les yeux, cherchant a lire en elle.
Il décida cependant d’ouvrir la bouche, conscient que la fixer de manière peu amène ne ferait pas évoluer les choses, et qu’ils pourraient se regarder en chien de faïence pendant longtemps… Enfin, jusqu’à ce qu’elle craque et prenne la parole.

-Bonjour.

Voilà qui avait le mérite d’être concis. Pas de fioriture, pas de sympathie ni d’ampathie. C’était neutre, tout comme son expression faciale.

« Alors… tu as déjà une idée dans quel cursus tu vas aller ? »

Isidore haussa les sourcils, se demandant si le fait qu’elle ait fichu sa vie en l’air l’autorisait à l’envoyer paitre franchement, mais il se dit que probablement pas. Il lui semblait presque entendre sa mère lui répéter qu’une femme, qu’importe son âge, doit être traitée avec respect, qu’importe la situation, et que s’il est en colère, il n’a qu’à choisir ses mots avec soin afin de l’attaquer, mais toujours poliment.
Fichus concepts.

-J’hésite… Je n’ai pas vu la filière qui permet de voyager dans le temps.. Ça m’aurait bien tenté, je me dis que j’aurais été plus à ma place dans une vingtaine d’années, mais bon.. La vie est capricieuse parfois…

Isidore sentit ses lèvres s’étirer en un sourire froid et narquois et laissa son regard glisser sur les stands qui se trouvaient devant lui avant de se poser sur Hermione Granger. Ses prunelles brunes étaient chargées de ressentiment, de colère muette et de fourberie.
Depuis le temps qu’il lui en voulait d’avoir détruit son existence misérable dans le « futur » (qui demeurait toujours son présent à lui) il sentait qu’il allait s’acharner sur cette pauvre fille, qui avait fait la pire erreur qui puisse être et surtout, qui n’avait toujours pas réussi à la rectifier.

Hermione ne sembla pas surprise par l’agressivité d’Isidore et lui répondit d’un air sec. Elle avait dû en accumuler des reproches, il s’en doutait mais ne parvenait pas à passer outre. Le fait qu’elle prononce le nom de Voldemort suffit a le faire frémir. Voilà qui n’avait rien de rassurant.
Lui essayait de parler à demi-mot et elle, moins.
Au moins elle essayait toujours de trouver la solution, et que cela lui prenne autant de temps était plutôt inquiétant. Pourquoi ?Elle était particulièrement intelligente, acharnée et douée… Alors si elle s’efforçait à arranger les choses, et qu’elle n’y arrivait pas… la situation devait être désespérée. Ou alors elle préférait résoudre le problème V avant.
Isidore soupira et se passa une main sur le front. Bon sang, que sa vie était… tordue.

« Si tu veux partir dans ce genre de recherche, je te conseille les potions et sortilèges. »

Isidore secoua la tête et se dit qu’il n’avait de toutes les façons rien à dire. Il n’avait pas essayé d’améliorer la situation, dans aucun sens. Alors, pourquoi continuer à lutter ? Il était désespéré et Hermione était l’origine du problème. Mais être en colère lui demandait de s’impliquer bien trop à son gout, il préférait la neutralité et l’indifférence.

-J’ai laissé tomber les potions il y a deux ans de ça, donc on oubliera. Et je ne suis clairement pas suffisamment passionné par les sortilèges donc passer ma vie à ça, ce n’est clairement pas une option qui m’intéresse. Ma vie est un néant, un abysse angoissant et confortable, une ombre mouvante rattachée à un soleil. Je n’ai pas grand-chose à retrouver dans le présent, ici se trouve la seule personne qui donne un sens à ma vie. Ma seule raison de rentrer c’est… De ne plus côtoyer des morts, de ne plus avoir cette fatalité sur les épaules, cette crainte de cesser d’exister à la moindre erreur.

Isidore avait fait un discours bien plus long qu’à l’accoutumée et se surprenait lui-même. Mais il devait se justifier, pour qu’Hermione comprenne sa volonté de rentrer, tout comme pour s’avouer à lui-même ses peurs. Son absence de futur et de ses piètres qualités. Combien même il aurait aimé aider à voyager dans le temps il en était incapable. Il aimait les choses simples et la nature. Il avait l’âme torturée d’un poète et se plaisait à observer. Tout.
Quel que l’endroit dans ce monde, qu’importe le temps présent, il n’était jamais à sa place.