Torturer sans se salir les mains - Tristan

Tristan n’arrivait surement pas totalement à réaliser ce qui était en train de se passer sur le moment. Après cette torture qu’il avait dû infliger à sa meilleure amie, cette voix s’était levée d’entre les morts, faisant siffler les oreilles de tous ceux aux alentours. Cette voix qui était reconnaissable entre tous et qui n’annonçait absolument rien de bon. Son discours eut de l’effet. L’effet d’un poison, et surtout d’un poids trop lourd à porter pour l’un des membres de l’Ordre du Phoenix. Le jeune homme tomba à genoux sur le sol, les yeux rivés vers le sol. Tellement de choses se passaient dans sa tête à ce moment précis, qu’il en devenait presque difficile de réfléchir correctement. Voldemort au pouvoir ne voulait rien dire de bon pour les gens comme lui se battant ardemment pour le camp adverse. Son identité n’était pas un secret pour la disciple de Celui-Dont-On-Ne-Doit-Pas-Prononcer-Le-Nom. Elle savait très bien qui elle était, et il savait aussi qu’elle n’en avait pas fini avec lui. Devant lui, Destiny était étalé sur le sol, inerte, inconsciente. Et Tristan ne pouvait pas empêcher les larmes qui perlaient sur ses joues, se rendant responsable de ce qu’elle venait de subir. Il lui avait fait ça, lui et personne d’autre, et c’était surement l’une des choses qu’il n’était pas prêt à se pardonner avant un bon moment. Il s’était toujours promis de la protéger envers et contre tous, prêt à donner sa vie pour qu’elle survivre. Aujourd’hui, sa promesse n’avait pas été totalement respecté, et il en avait que trop conscience.

Une main se posa sur son épaule, et le visage de Destiny disparut, en même temps que l’atmosphère étrange du village sorcier. Le trajet lui souleva le cœur, pas tant par la manière, mais surement parce qu’il connaissait la suite. Aujourd’hui, il ne pourrait pas rentrer à Poudlard, il n’allait pas revoir ses appartements. Jamais il n’avait imaginé en se levant ce matin que la partie tournerait aussi mal pour lui. Et pourtant … Ils arrivèrent dans une grande salle vide, il n’y avait que lui et cette disciple. Tristan observait les alentours, espérant trouver un indice qui lui indiquerait où il se trouvait. Mais il n’y avait rien. Pas de fenêtre, pas de décoration. Simplement des murs grisonnant donnant une apparence de froideur à cette pièce. Il pouvait se trouver à Pré-Au-Lard dans un sous-sol tout autant qu’à l’autre bout de l’Ecosse. Il n’en avait pas la moindre idée. Son regard se reposa l’instant d’après sur la femme qui s’étirait. Elle n’était plus pressée par le temps visiblement, jugeant qu’elle pourrait aller à son rythme sans que personne ne vienne la déranger. Et malheureusement pour Tristan, elle avait sans doute raison. Elle s’approcha de lui pour lui prendre sa baguette des mains. Le jeune professeur n’opposa aucune résistance. Elle disparut l’instant d’après. Instinctivement, Tristan porta sa main sur son cœur où se trouvait la poche de sa chemise. La photo de sa femme était là. Comme toujours, il l’avait sur lui, lui rappelant ses erreurs, lui donnant du courage dans chaque situation. Aujourd’hui, il avait besoin de cela plus que jamais.

La jeune femme apparut l’instant d’après. Et elle commença à lui parler. Visiblement elle avait compris un minimum à qui elle avait à faire, puisqu’elle lui annonça être au courant que le faire craquer serait une tâche compliqué. Elle se présenta, lui donna même son nom. Un nom de famille qu’il connaissait. Elle était la femme de Nott. Tristan faisait le rapprochement maintenant, se souvenant de cette liste au quartier général avec les noms et relations de tous les possibles mangemorts. Tristan resta le visage impassible, ne voulant pas lui donner la moindre réaction. Pas de masque, et pas de cachotteries sur son identité. Intéressant. Tout comme ces justifications. Toujours sous impero, le jeune homme ne contrôlait que trop peu son corps. La demoiselle s’approcha de lui pour essuyer les larmes sur ses joues. Et elle mit fin au sortilège. Tristan se sentit libérer d’un poids énorme. Il avait besoin de sa conscience, de son propre libre-arbitre. Le jeune homme l’observait en silence, la voyant condamner chaque issue. Il ne pourrait pas sortir d’ici. Soit il mourrait dans ce sous-sol, soit elle le laissait s’enfuir, il n’y avait pas d’autre possibilité. Et malheureusement pour lui, la première solution était la plus plausible. Elle voulait désormais parler. Evidemment, elle ne l’avait pas ramené ici pour rien.

– Je n’ai plus de baguettes, et les issues sont bloquées. Je ne vais pas gaspiller mon énergie pour sortir d’une prison infranchissable.

Répondit-il calmement. Il voulait qu’elle sache qu’il l’avait comprise. Il voulait qu’elle voie qu’il n’était pas aussi faible qu’elle ne le pensait. Et il n’avait certainement pas l’intention de lui faciliter la tâche en coopérant. Il était assez intelligent pour savoir quelle bataille mener, et celle de s’enfuir était sans-issue. Sa baguette en main, elle le fixait d’un regard froid, sadique et impatient à la fois. Et elle prononça quelques mots. Tellement prévisible. Elle voulait des informations sur l’ordre. Tristan eut un petit rire incontrôlable. Et la femme pointa sa baguette sur lui, lui montrant clairement qu’elle avait le pouvoir et qu’il était totalement à sa merci.

– Un groupuscule qui se bat contre les pourritures dans votre genre, à ce qu’il parait. Je ne suis pas au courant de grand-chose.

Répondit-il. Sa dernière phrase fut prononcée avec un faible sourire en coin. Il mentait, et il savait qu’elle savait qu’il mentait. Ce n’était pas tant ce qu’il venait de dire qui était important, mais le message qu’il portait derrière, il n’avait pas l’intention de lui faciliter la tâche, et de lui servir toutes les informations sur un plateau d’argent. Il la fixa, yeux dans les yeux, comme prêt à recevoir la punition qu’elle jugerait nécessaire pour le faire parler … Tant qu’il pourrait être debout, il allait se battre.

Tristan ne pouvait pas tout laisser tomber et abandonner maintenant. Tant qu’il n’était pas mort, étendu sans vie sur le sol, il avait encore une chance de s’en sortir, et c’était cette pensée qui le faisait tenir. Peu importe qui il avait en face de lui, peu importe l’endroit où il se trouvait, il avait encore cette lueur d’espoir dans son cœur. Il n’était pas quelqu’un de stupide, et c’était surement à cause de cela qu’il se trouvait ici aujourd’hui. Elle en voulait à ses connaissances, à ce qu’il savait sur les ennemis du mage noir, et elle avait la personne parfaite entre les mains. Il ne savait pas encore jusqu’où il pouvait aller, jusqu’où il tiendrait. Mais une chose était sûr, il avait encore son esprit et sa capacité d’analyse bien à lui. Il devait s’en servir. Elle lui avait conseillé de ne pas s’enfuir, sous cause d’être puni remarquablement. Calme pour le moment, Tristan s’était contenté d’observer. Toutes les issues étaient bloqués, le transplanage n’était pas une option, et il n’avait plus sa baguette, contrairement à elle. Il aurait été stupide de tenter quoi que ce soit maintenant. Même si sa force physique était plus grande que la demoiselle, il ne faisait pas le poids tant qu’elle était concentrée sur lui seul dans cette pièce. Il en avait conscience. Comme pour lui faire comprendre qu’il avait compris, il lui affirma qu’il n’allait pas essayer de s’enfuir. La femme eut l’air visiblement déçu, et étrangement Tristan n’était pas surpris par une telle réaction. Elle s’amuserait sans doute plus avec un adolescent pensant à agir avant de réfléchir, avec quelqu’un de totalement impulsif, qui lui aurait déjà sauté dessus pour essayer de s’enfuir et de sauver sa vie. Si c’était ce qu’elle attendait, elle serait déçue. Tristan n’était pas de ce genre, et ne l’avait jamais été. Il allait réfléchir méticuleusement à chacune de ses actions ou paroles, tant qu’il le pourrait, tant qu’il le voulait.

Elle afficha clairement sa déception, le pensant apparemment plus combattif. Et comme il l’avait pensé, elle aurait aimé qu’il tente quelque chose. Pourtant, elle ne s’en rendait peut-être pas compte, mais il était plus combattif qu’elle ne le pensait. Ne pas agir n’était pas une preuve de faiblesse en soit, au contraire. Il savait choisir ses batailles, et il se battrait psychologiquement contre elle, si cela était nécessaire. Tristan se contenta de la regarder pour simple réponse. Il l’observait, elle, ses paroles, ses mimiques, son comportement. Ce n’était pas lui qui menait la partie d’un point de vue extérieur. Alors il ne faisait rien, attendant simplement qu’elle joue cartes sur table, en lui disant ce qu’elle voulait de lui. Des informations sur l’ordre ? Un petit sourire s’afficha sur le visage du jeune homme. Lui comme elle savait la réponse qui allait en suivre : un mensonge, niant toute complicité dans cette association contre les mages noirs. Non elle n’était pas stupide, Tristan était sûr de cela. Elle savait qu’il ne craquerait pas aussi facilement. Elle savait que le jeu qu’elle avait commencé allait être une terrible partie d’échec où la patience serait la clé pour remporter la victoire.

Evidemment qu’il savait quelque chose. D’ailleurs il en savait beaucoup trop pour se retrouver seul dans une pièce désarmé avec un mangemort. Il était l’un des membres les plus actifs, et dernièrement avait participé à beaucoup de missions secrètes, ce qui forcément le mettait dans une position délicate.

– J’imagine que vous avez fait des recherches sur mon passé pour affirmer une telle hypothèse, n’est-ce pas ? Intéressant … Je me demande si vous êtes capables de rassembler de véritables informations en vue de vos méthodes …

Répondit le jeune homme calmement. Il voulait détourner cette conversation, mais également savoir ce qu’elle avait appris sur lui. Comment les mangemorts dégotaient leurs informations sur les membres de l’ordre, c’était quelque chose d’important pour eux. Elle reviendrait surement très vite sur ce qu’elle voulait savoir. Mais plus il la faisait parler, plus il apprendrait à connaître et décerner sa personnalité, et peut-être qu’il pourrait trouver des failles, le but étant évidemment d’essayer de sortir d’ici en vie.

Elle s’était approchée de lui lentement. Et finit par lui susurrer quelques mots à l’oreille. Elle voulait entendre qu’il avait pris du plaisir en lançant le sortilège de torture sur sa meilleure amie.

– Si j’ai ressenti quelque chose … Le plaisir intense et la satisfaction qui aurait parcouru mon corps si vous aviez été ma victime à ce moment-là.

Tout ce qui touchait à Destiny était plus compliqué. On le sentait au son de sa voix, au regard sur son visage que c’était personnel, que c’était un sujet qui le touchait. Elle était sa faiblesse. Indra possédait l’avantage sur le jeune membre de l’ordre.

La souffrance pouvait rendre totalement fou. La souffrance pouvait amener les gens à penser que la mort était la seule issue pour s’en débarrasser. Tristan avait souvent pensé à cela. Depuis qu’il avait commencé à s’impliquer d’avantage dans les missions périlleuses de l’ordre du phoenix, il avait gardé dans un coin de sa tête la possibilité de se faire prendre et de tomber entre les mains de l’ennemi. Ce cauchemar était maintenant réalité. Il était désormais dans une pièce sans aucune issue avec une femme aussi glaciale que sadique. Dans l’impossibilité de sortir, et de se battre, il n’avait presque aucune chance de se sauver. Dans son esprit, la mort était présente. Il se doutait qu’il ne ressortirait jamais de cette pièce. Et pourtant il ne pouvait totalement le croire. Il ne voulait pas perdre ses derniers espoirs, ceux qui le maintenaient en vie, ceux qui lui permettait de ne pas totalement baisser les armes. La douleur dans ses muscles le lancinait, un effet secondaire à tous les sortilèges de torture qu’elle lui avait fait subir alors qu’ils étaient encore en plein milieu de la bataille à Pré-au-Lard. La dernière vision qu’il avait eue était celle de sa meilleure amie étendue sur le sol. Tristan secoua sa tête pour chasser cette image de son esprit. Il ne pouvait pas et n’avait pas le droit de s’affaiblir lui-même avec des pensées comme celles-ci. Il devait rester fort, pour elle. Parce qu’après tout, il voulait encore et toujours la protéger. Ce sortilège qu’il avait lancé était aussi dans ce but, pour ne révéler au monde sa véritable identité.

Tristan avait compris de par les paroles et les actes de la femme qu’il avait en face de lui qu’elle aurait aimé qu’il se débatte, qu’il se batte contre elle pour sortir d’ici. Tristan n’avait pas l’intention de lui donner ce qu’elle voulait. Il avait bien compris qu’il ne pourrait pas quitter cet endroit par la force. Pas maintenant en tout cas. Il voulait mener une bataille psychologique, une bataille de mots plutôt que de poings. Et puis sans baguette, il était bien trop facile à contrer. Ce n’était pas la peine de gaspiller son énergie de cette façon. Elle voulait des informations sur l’ordre. Et l’un comme l’autre savaient qu’il n’allait pas les lâcher aussi facilement. Répondre sur l’humour, mentir, en sachant très bien qu’elle connaissait la vérité était la première partie de cette conversation. Le jeune homme ferait tout pour ne pas donner une seule information à la demoiselle. Bien sûr, il ne pouvait pas s’en faire la promesse, il ne savait pas quel genre de torture émotionnelle ou physique elle avait prévu pour le faire craquer.

Essayant de détourner la conversation à son avantage, Tristan savait que tout n’allait pas être simple. La femme était loin d’être stupide. Mais lui ne l’était pas non plus. Elle lui répondit froidement que les mangemorts savaient des choses tout comme l’ordre. Elle semblait vouloir le convaincre qu’ils n’étaient pas des ignorants. Tristan hocha la tête doucement, se laissant le temps de réfléchir avant de répondre à la mangemorte.

– Des ignorants ? Non certainement pas. Mais je doute que vos méthodes soient réellement efficaces. Vous avez surement eu vent d’informations erronées, le genre d’information que l’ordre laisse filtrer.

Oui il cherchait à mettre en cause ces informations, il cherchait à l’énerver sur la possibilité qu’ils aient des fausses informations. Ce n’était surement pas entièrement la vérité. Tout comme l’ordre, ils avaient pu récolter des informations sur leur groupe. Mais l’énerver dans ce sens lui donnera peut-être l’envie d’en partager un peu de ces informations. Il doutait qu’il puisse sortir d’ici vivant un jour, mais si c’était le cas, il ne reviendrait pas les mains vides. Et savoir ce les informations qu’ils avaient en leur possession pourraient peut-être l’aider à sortir d’ici qui sait. Il n’allait pas abandonner, il n’était pas prêt pour cela. La brusquer, la pousser dans ses retranchements, lui faire croire qu’elle et son clan étaient en dessous de l’ordre allait provoquer de la colère. Et si sa colère pouvait lui faire du mal, elle pouvait également délier sa langue. Du moins, il l’espérait. Il avait besoin de quelque chose avec quoi travailler, il avait besoin de quelque chose sur quoi s’appuyer.

Elle s’était ensuite rapprochée de lui doucement, lui susurrant à l’oreille des mots. Elle appuyait une nouvelle fois où ça faisait mal, elle voulait lui rappeler la noirceur qui avait envahis son cœur lorsqu’il avait lancé l’un des sortilèges impardonnables. Non il n’avait pas pris de plaisir à torturer sa meilleure amie, sa famille. Mais il en aurait surement pris si elle avait été sa victime. Il se serait délecté de mettre une pourriture dans son genre hors d’état de nuire. Elle lui renvoya en pleine figure que s’il avait été plus rapide, plus malin, cette scène aurait pu être possible. A vouloir protéger Destiny, il avait perdu, selon elle. Elle rigolait de cette situation. Et Tristan serrait les dents pour se contrôler, pour garder son calme. Il n’avait pas le choix. Il ne pouvait pas la laisser l’atteindre aussi facilement.

– J’aurais pu. Mais si je l’avais fait, vous n’auriez eu personne avec qui jouer en ce moment. Il est préférable que ce soit moi qu’un pauvre gamin innocent, n’est-ce pas ?

Il ne voulait pas lui montrer de faiblesse, il ne voulait pas reconnaître que s’il avait été plus ses gardes, cette situation aurait été totalement différente. Elle l’avait kidnappé lui, et ce n’était pas un choix fait de façon aléatoire. Elle n’aurait pas pris un enfant innocent, elle voulait quelqu’un d’utile qui puisse lui apporter des réponses. Il la vit s’éloigner, lui tourner le dos. Tristan avança d’un pas, il n’eut pas le temps d’en faire plus puisque l’instant d’après il était expulsé violemment sur le sol. Il atterri sur son épaule, et ne put rattraper un léger cri de douleur. Ses nerfs étaient à fleur de peau à cause de la torture. Et la question d’après arriva, elle lui demandait s’il avait déjà entendu parler d’elle avant aujourd’hui. Tristan prit le temps de se relever. Il ne voulait pas être à terre mais bien debout pour lui faire face.

– Indra Yaxley. Scolarisé à Poudlard pendant sept ans, chez les Serpentard. Préfète de sa maison. A pris la marque des ténèbres lors de sa première année à l’université. Rencontré son mari à Poudlard. Travaille au Ministère de la Magie, dans le département des transports magiques.

Le jeune homme se tût, regardant la jeune femme dans les yeux, avant de reprendre la parole quelques secondes après.

–Me rendriez-vous l’amabilité ?

Tristan ne voulait pas perdre la face, il ne voulait pas s’abandonner à une situation qui semblait déjà scellé et tragique. S’il devait réellement mourir aujourd’hui, ne serait-ce pas mieux de protéger à tout prix ses idéaux, son camp, et par conséquent les informations qu’il connaissait sur l’ordre du Phoenix ? Ce serait mentir de dire que le jeune professeur n’était pas terrorisé. En réalité, il avait réellement peur. Car il savait que les mangemorts n’avaient absolument pas les mêmes techniques qu’eux. Il savait que cette femme prendrait son pied à le voir souffrir encore et encore sous ses yeux. Elle voulait le détruire, casser chaque petite partie de lui qui le l’humanisait pour n’en faire qu’un pantin qui lui révélerait ce qu’elle voulait entendre. Elle ne l’avait pas choisi par hasard. Et cela en soit était inquiétant. Les membres de l’ordre avaient donc été sous active surveillance du camp adverse sans même qu’ils ne s’en rendent compte. Depuis combien de temps ? Peut-être que Tristan s’en faisait pour rien. Ils avaient dû en conclure qu’il faisait parti de l’ordre à cause de son intervention dans la bataille du Ministère en mars dernier. Même s’ils avaient perdus, même si leur camp les avait repoussés, ils leur avaient également donné de précieuses informations sur les membres qui la composaient. Le jeune homme ne pouvant pas se défendre physiquement sous peine de mourir dans les plus brefs délais, ou de se faire torturer par la folie, avait opté pour une approche beaucoup plus calme.

Tristan voulait continuer de la faire parler encore et encore. Au mieux pour récolter un tas d’informations qui puissent peut-être l’aider par la suite, au pire pour repousser le moment où elle ressentirait à nouveau le besoin de le torturer pour le faire parler. Parce qu’elle allait sans doute vite se rendre compte que la manière douce ne marcherait pas sur le jeune homme. Il n’avait pas la moindre intention de lui donner des informations sur l’ordre. Parce qu’il n’était pas aussi stupide. La peur n’allait pas dicter sa conduite. Et il n’était pas assez égoïste pour balancer tout ce qu’il savait en échange de sa vie. Il était le genre de personne qui se battait corps et âmes pour ses idées, et pour ce qu’il pensait être juste. Il était hors de question de corrompre son âme simplement pour échapper à une mort de toute façon certaine. Tristan la cherchait, essayait de la déstabiliser ou de la mettre en colère pour qu’elle perde patience et pour qu’elle lâche quelques informations elle aussi. Mais retourner la situation à son avantage n’était pas aussi simple que cela paraissait. Elle n’était pas stupide elle non plus. Et aussi surprenant que cela puisse paraître, elle ne semblait pas si impulsive qu’il l’aurait pensé. Il l’avait clairement sous-estimé pour le coup.

– Impressionnant. Sacrifier une bataille pour mieux contrôler la prochaine était un bon plan. Il semblerait que nous vous ayons sous-estimé. Qu’est-ce que vous avez appris d’autre alors ? On sait tout les deux que je ne vais pas sortir d’ici, autant jouer franc-jeu, qu’en pensez-vous ?

Annonça le jeune homme. Avaler soi-même sa mort prochaine était compliqué. Mais s’il devait réellement y rester, autant qu’il ne meurt pas ignorant. Tristan cherchait réellement à la faire parler, essayant différentes techniques pour mieux la comprendre, pour mieux l’analyser. Il voulait essayer de voir qui elle était, comme elle agissait et réagissait. Mieux il connaîtrait ses réactions, mieux il pourrait les prévoir. Et cela lui donnerait un bon avantage sur elle. Du moins il espérait que cela se passe aussi bien que dans sa tête. Maintenant qu’il avait essayé la flatterie, il était sûr qu’il n’allait pas rester longtemps sur ce registre. Il était compliqué de jouer cela lorsque la personne en face vous dégoûter très clairement. Mais il fallait ce qu’il fallait pour survivre. Et dans son inconscient, il continuait de se battre pour vivre.

La situation magique était maintenant entre les mains des mangemorts. Et même si Tristan ne savait pas ce qu’il se passait dehors, il pouvait imaginer que cela n’annonçait rien de bon. Tout ce qu’ils avaient craint pour la société était sur le point d’arriver. Les né-moldus allaient surement être pourchassés, les règles allaient être changés, et tout les traîtres traqués, surement tué ou pire envoyé à Azkaban. Tristan pouvait être sûr d’une chose, il était sur la liste des personnes à éliminer pour le bien de la montée en puissance du Lord et de ses sbires. Et comme il était entre les mains de l’un d’entre eux, son avenir n’allait pas être très glorieux. Mais finalement c’était mieux que ce soit lui en face d’Indra plutôt qu’un pauvre gamin sans défense. Lui avait de la ressource, et il était adulte. Indra trouvait les gosses trop faibles à son goût apparemment. Etrange comme point de vue, mais rassurant quant à la survie des gamins de Poudlard. Elle le cherchait. Et elle savait exactement où appuyer pour faire réagir le jeune homme. En entendant le prénom de Destiny, il serra le poing comme pour se contrôler de ne pas exploser et perdre son sang-froid en face de cette pourriture.

– Ne parlez pas d’elle. Parce que si elle est morte, vous allez mourir aussi.

Déclara-t-il d’une voix glaciale. Clairement il ne contrôlait pas ses émotions quand il s’agissait de sa meilleure amie. Non il ne voulait pas penser à cela maintenant. Il ne voulait pas croire qu’elle puisse être morte. Car si c’était le cas, c’était lui qui l’avait tué, et c’était une chose qu’il ne se pardonnerait jamais. Il ne pouvait pas laisser la mangemorte l’atteindre. Il ne pouvait pas se laisser aller. Il fallait qu’il se déconcentre, et qu’il chasse ces mauvaises idées de sa tête. C’était exactement ce qu’elle voulait : le déstabiliser. Et le problème était qu’elle y arrivait.

La demoiselle était curieuse de connaître les informations qu’il détenait sur elle. Tristan prit le temps de réfléchir un instant. C’était l’occasion de laisser filer quelques informations sans importances, de lui en montrer peu. Pas assez pour qu’elle pense que l’ordre avait trop d’informations sur le compte des mangemorts, mais assez pour leur montrer qu’ils n’étaient pas ignorant. Une fois qu’il ait fait sa présentation, il lui demanda la même amabilité. Intéressant. Outre sa scolarité, elle était au courant pour Eristia. Mais ce n’était pas le pire. La dernière phrase surprit grandement Tristan, qui eut du mal à cacher son étonnement. Une seconde seulement avant de se reprendre.

– Alors il est de mèche avec vous ?

Il avait besoin de savoir ce détail. Et cela se sentait dans le ton de sa voix, laissant apparaître une nouvelle faiblesse pour son bourreau. Avant qu’il n’eut réellement le temps de réagir, il fut touché en plein visage d’un sortilège, et finit suspendu dans les airs, la tête en bas. Visiblement elle avait fini de rigoler et elle voulait expressément des réponses. Il était dans une mauvaise passe et se rendait bien compte que s’il refusait tout simplement de répondre, il allait subir bien pire qu’un levicorpus. Mais d’un autre côté, il ne pouvait pas lui révéler comment ils étaient au courant de ces informations sans compromettre l’ordre. Le dilemme était de taille, et même lui ne savait pas encore ce qu’il allait faire. Mais elle lui avait simplement demandé depuis combien de temps ils étaient au courant, et pas comment ils l’avaient su.

– Ca fait quelques mois déjà.

Répondit-il calmement, sur le même ton que son interlocutrice.

Tristan ne s’était jamais senti aussi vulnérable, aussi proche d’une mort certaine. Il n’y avait rien qui puisse justifier la terreur, la torture, la séquestration de toute personne humaine. Mais les mangemorts et leurs adeptes ne jouaient pas dans la même cours que tout le monde. Jamais il n’aurait réellement pu deviner ou se préparer à finir dans un endroit pareil. Bien sûr, il s’était mis en danger lui-même ces derniers mois en jouant un rôle très actif au sein de l’ordre du Phoenix. Il avait conscience de ce qu’il risquait. Il savait qu’il pouvait payer de sa vie ses activités en dehors de Poudlard. Mais il était encore jeune. Un jeune adulte qui n’avait pas totalement encore conscience des réels dangers que la vie impliquait. Aujourd’hui, il avait eu un dur retour à la réalité. Les soutiens du Lord étaient féroces, et prêt à tout. Il en avait fait les frais, et allait continuer jusqu’à qu’il lui donne les informations qu’il voulait, ou jusqu’à qu’il meurt à cause des souffrances d’une torture aussi bien physique que psychologique. Depuis qu’ils étaient arrivés dans cette pièce fermée de toute part, Indra ne lui avait pas encore réellement fait subir de gros châtiments corporels. Elle se contentait pour le moment de lui poser des questions encore et encore pour avoir des informations sur le camp adverse. Mais Tristan n’allait pas se laisser faire aussi facilement. Il ne plierait pas sans combattre, c’était une certitude. Il ne pouvait pas, ne voulait pas donner à cette femme abjecte ce qu’elle voulait. Il ne pouvait pas trahir son camp, peu importe ce que cela signifiait pour lui. Pour le moment, il était plein de belles pensées. Mais qu’arriverait-il si elle commençait à le torturer presque jusqu’à la folie ? Ses bonnes intentions allaient-elles rester longtemps en place lorsqu’il hurlerait de douleur sur le sol ? Pas sûr. Tristan n’était pas stupide, il avait besoin lui aussi d’information, ou au moins de gagner du temps.

Et pour ce faire, le garçon demanda à son interlocutrice de jouer franc-jeu. Après tout, s’il allait mourir dans cette pièce, autant comprendre ce qui se passait de l’autre côté. La demoiselle lui offrit un sourire, ce qui n’augurait sans doute rien de bon pour la suite des choses. Elle ne semblait pas réellement ouverte à la proposition du garçon. Au contraire, elle trouvait déjà qu’elle lui faisait une fleur en ne l’attachant pas, et en ne le torturant pas. Ce qui d’un côté était le cas, il était bien obligé de se l’admettre. Elle ne voulait absolument pas partager le pouvoir, ce qui était d’un certain sens logique, et voulait établir ses propres règles, ses propres jeux. Même si elle ne lui donnait pas de réponses à ses questions, Tristan en apprenait beaucoup en observant le comportement de son bourreau. S’il arrivait à cerner sa personnalité, peut-être que cela pourrait l’aider à un moment ou à un autre.

– Très bien. Questions-réponses ce sera alors. Ais-je le privilège de poser des questions également, car sans ça le jeu risque fortement d’être ennuyant.

Ce n’était sans doute pas très intelligent de répondre de cette façon, sur un ton détaché. Elle n’allait pas aimer les libertés que le jeune homme s’attribuait à lui-même, parlant comme s’ils étaient égaux, alors que dans cette pièce, il était clair qu’ils ne l’étaient pas. Mais Tristan avait quand même l’avantage d’être debout face à la jeune femme. Il était capable de bouger, de parler, de voir. Elle aurait très bien pu l’attacher et lui bander les yeux, chose qui aurait été compliqué à vivre pour le jeune homme. Tristan essayait tant bien que mal de garder le contrôle. Il avait besoin de se montrer impassible. Il fallait qu’il montre à cette femme qu’il n’était pas faible, et qu’elle avait en face de lui un adversaire intéressant. Il sentait qu’elle avait besoin de voir qu’il était plus qu’une marionnette qu’elle pouvait contrôler. Il avait du répondant, et ne cesserait pas d’essayer d’en savoir plus. Elle le savait, il le savait. Le jeune homme n’était pas compliqué à comprendre. Destiny lui avait souvent dit qu’il était aussi facile à lire qu’un livre ouvert à cause de ses gestes, de ses mimiques, de sa façon de réagir. Aujourd’hui, il essayait de toutes ses forces de ne pas être comme cela. Il ne voulait pas que cette folle puisse lire en lui aussi facilement. Alors il essayait d’aller contre sa propre-nature pour lui compliquer la tâche.

Mais elle l’avait cerné. Elle avait déjà compris que son point sensible était sa meilleure amie. Et avec un tel atout dans sa poche, elle allait forcément l’utiliser contre lui. Lui ne voulait pas. Il ne voulait pas qu’elle lui parle de Destiny, alors qu’il ignorait encore si elle était en vie ou non. Quand elle reporta son attention sur le sujet, le jeune homme réagit instantanément, serrant son poing de toutes ses forces, comme pour se contrôler. Mais il n’y arrivait pas. Le sujet était bien trop sensible. Tellement qu’il proférait des menaces à l’encontre de cette sorcière.

– Ne sous-estimez pas le pouvoir de l’amour. Je trouverais un moyen de vous tuer, même si ce n’est qu’avec mes poings.

Elle se moquait de lui. Et Tristan plongeait la tête la première dans son petit jeu machiavélique. Il n’arrivait pas à faire semblant, il n’arrivait pas à se contrôler quand il s’agissait de sa meilleure amie. Elle était la personne la plus importante dans sa vie. Et si elle était morte, il ne se le pardonnerait sans doute jamais.

La conversation s’arrêta cependant pour le plus grand plaisir de Tristan qui ne voulait pas qu’elle prenne l’ascendance sur lui pendant trop longtemps. Elle voulait désormais avoir des informations concrètes. Elle avait d’ailleurs fait preuve de curiosité en demandant au garçon ce que l’ordre savait à son sujet. Tristan lui répondit, ne voyant pas vraiment le mal à lui donner des informations futiles. Encore un moyen d’essayer de gagner du temps. Et elle lui rendit la pareille, tout en lui faisait comprendre qu’elle avait eu des contacts avec son père. Tristan ne put cacher sa surprise. Et demanda instantanément s’il faisait parti de leur petit clan. Bien sûr, il espérait plus que tout avoir une réponse négative.

– J’imagine que vous avez bien dû vous entendre. Il est vrai que quand on sait où chercher, les informations arrivent nettement plus rapidement.

Répondit le jeune homme tout en accentuant sa seconde phrase, pour qu’elle comprenne bien que l’ordre savait également où chercher pour dégoter des informations importantes et utiles sur leur camp. Ils n’étaient pas les seuls à trouver. Mais Tristan avait compris qu’il avait attiré son attention sur un tout autre sujet. Elle voulait savoir comment l’ordre était au courant de la date à laquelle elle avait pris la marque. Tristan lui fit un petit sourire, avant de hausser les épaules de façon nonchalante.

– Aucune idée.

Répondit-il. Il savait qu’il allait clairement l’énerver en jouant de la sorte.

Tristan sentait que son ton n’était que trop peu apprécié par la mangemort. Il avait essayé de pousser toujours plus loin pour découvrir les limites de cette femme avec qui il allait sans doute passer les dernières heures de sa vie. Mais elle commençait à cruellement manquer de patience devant un jeune adulte insoumis, et pas décidé à jouer selon ses règles. Elle voulait lui poser des questions sur l’ordre, et évidemment elle voulait des réponses. Son but n’était pas simplement d’avoir une conversation d’égal à égal avec lui. Il le comprenait bien. Mais pour autant, il ne pouvait pas répondre aux questions. Il ne pouvait pas donner des informations au camp adverse. L’ordre représentait beaucoup pour lui, et son implication de ces derniers mois lui avait donné accès à beaucoup trop d’informations. Des informations que les sous-fifres du seigneur des ténèbres pourraient bénéficier s’ils les récupéraient. Tristan n’était pas une balance, et il ne pensait pas non plus être faible. Il voulait croire qu’il pouvait encaisser les attaques de la jeune femme encore et encore sans jamais laisser échapper une information secrète. Mais il était lucide, et au fond de lui savait que bien des personnes craquaient sous la torture. La demande qu’il avait avancée à Indra ne lui avait pas plu. Non elle n’allait pas jouer à l’égalité entre eux, et elle ne répondrait certainement pas à ses questions. Mais Tristan se devait d’essayer, et de la pousser dans ses retranchements, après tout ce serait peut-être la dernière chose qu’il pourrait faire.

Elle eut un petit mot de battement, avant de reprendre la parole pour s’adresser au jeune professeur. Elle tentait de garder son calme, mais Tristan avait l’impression que ce n’était qu’une façade, et qu’elle pouvait lui sauter à la gorge à la prochaine parole qu’il allait prononcer. Visiblement elle voulait lui enseigner l’autorité. Elle le prenait même pour un gamin, comme s’il était de nouveau un adolescent qui essayait de se rebeller contre le corps professoral. Les paroles qui sortaient de la bouche de la mangemort étaient réellement stupides. Mais il ne l’était pas assez désormais pour la contredire totalement. Ce n’était pas une question d’autorité entre eux, mais de pouvoir. Elle avait l’ascendant sur lui non pas parce qu’elle était plus vieille, mais parce qu’elle l’avait privé de tous ses moyens de défense.

– Votre autorité ne peut marcher sur moi que parce que vous m’avez privé de tous moyens de défense, pas dû à votre âge plus avancé. Je n’ai pas réellement l’impression que votre camp aime jouer selon les règles.

Non, il pouvait respecter les règles, certes, mais comment faire confiance à un mangemort, alors qu’ils étaient prêts à n’importe quoi pour arriver à leurs fins. Il n’y avait pas de règles avec eux. Et Tristan ne voulait pas fermer sa bouche. Parler avec cette femme était sa dernière arme, la seule qu’elle ne lui avait pas encore prise. Il comptait bien s’en servir, essayait du mieux qu’il pouvait, essayer de survivre, essayer de ne pas se perdre en chemin. Tristan était coincé dans cette pièce. Il ne pouvait pas se défendre. Il savait que s’il faisait un faux-pas, son interlocutrice lui rendrait au centuple. Il n’était pas assez fou pour tenter une évasion, pour tenter de l’abattre physiquement. Mais il pouvait toujours essayer de l’atteindre mentalement. C’était sa meilleure chance après tout. C’était pourquoi il ne bougeait pas tellement. En soit, il aurait pu se promener dans la pièce, mais il avait décidé de faire face à cette femme, droit devant elle, comme pour lui prouver qu’il ne tomberait pas sans se battre. Comme pour lui montrer qu’il pouvait lui résister, qu’il avait assez d’endurance pour cette course contre elle.

Elle cherchait continuellement à l’atteindre, et à le déstabiliser, et sa meilleure arme était Destiny. Elle savait à quel point cette jeune femme comptait dans le cœur de Tristan, et elle tirait sur cette corde sensible encore et encore pour lui faire perdre son sang froid. Il aurait voulu ignorer ces paroles, mais il en était capable. Rien que d’imaginer la possible mort de sa famille le mettait dans tous ses états. Si elle était morte, Indra allait mourir aussi. Il se le promettait intérieurement. Il ne savait pas encore comment il le ferait, mais une chose est sûr il y arriverait. Indra se mit à rire, très confiante. Evidemment, elle n’avait pas peur des menaces, ayant totalement le pouvoir, et étant intouchable ici. Elle pouvait toujours rire maintenant.

– Je ne m’attendais pas à ce que vous compreniez mon point de vue. Mais le jour où vous allez mourir, vous repenserez à ce que je vous ai dit.

Répondit le jeune homme, reprenant son calme et essayant de se contrôler face à la désinvolture de cette terrible femme. C’était terminé, il ne pouvait plus la laisser prendre le contrôle de ses pensées, et le pousser droit dans le mur.

La discussion recommença par un partage d’information des deux camps sur l’un et l’autre. Tristan eut l’occasion d’apprendre que le camp adverse était réellement bien informé sur sa personne, et que les mangemorts avaient même eu des contacts avec son père. Encore un coup de poignard dans le ventre. Si Tristan essayait de jouer l’indifférence, c’était réellement difficile pour lui de recevoir les informations de la jeune femme. Savoir que son propre père avait mis sa vie en danger en donnant des informations à l’ennemi … Un fossé se creusait entre les deux hommes plus le temps avançaient. Et si Tristan sortait d’ici un jour, il ne savait réellement pas si les choses pouvaient être récupérables dans leur relation père-fils. Encore une fois, elle lui lança une pique. Le jeune homme garda le visage fermé, ne répondant pas. Il ne voulait pas lui donner encore une fois le plaisir de l’avoir atteint par ses paroles. Il en était hors de question. Mais Indra se reconcentra très vite sur ce qui l’intéressait. Elle voulait savoir comment ils étaient au courant pour la date de la marque qu’elle avait prise. Tristan répondit qu’il n’en avait aucune idée. Un brin provocateur. Elle voulait cette information, il n’allait pas lui donner aussi facilement. Mais la patience de la sorcière avait des limites, elle lui lança un sortilège qui le propulsa plus loin, sur le sol dur de la pièce. L’homme retomba violemment sur son bras, et sentit la douleur l’attaquer. Mais il n’était pas au bout de ses peines, il s’en rendait bien compte. Elle n’appréciait pas, le traita de crétin, avant d’envoyer un autre sortilège.

Mais cela n’avait rien à voir avec un simple expelliarmus. Sur le sol dur de cette pièce, le jeune homme croisa le regard d’Indra quand elle prononça la formule. L’instant d’après, il était prisonnier d’une douleur terrible. Elle l’avait déjà torturé plus tôt dans la journée. Pourtant, ça ne l’avait pas préparé à recevoir ce sortilège une nouvelle fois. Au contraire, il avait l’impression que la puissance de celui-ci était décuplée. Il se tordait de douleur, cherchant une image, une pensée pour sur laquelle se concentrer. Mais il en était incapable. Tout ce qu’il pensait c’était cette douleur. Elle était partout : dans tous son corps, dans sa tête. Et ces pensées suicidaires qui revenaient. La mort offrait une solution à une douleur que son corps ne pouvait plus supporter. Il l’entendait lui parler. Cette voix sur laquelle il essaya de se concentrer pour limiter cette douleur intenable. Alors que des gémissements incontrôlés sortirent de sa bouche, le sort s’arrêta enfin. Une bouffée d’air frais. Evidemment la douleur était présente, mais tellement minime par rapport à ce qu’il venait de subir. Elle voulait clairement le détruire. Tout était bon pour que cette douleur ne revienne pas. Ses belles intentions se retournaient dans son esprit.

– On a reçu des informations de l’intérieur.

Avoua le jeune homme dans un murmure. Il savait que cela ne serait pas suffisant. Il savait qu’Indra n’allait pas se satisfaire d’une réponse aussi évasive. Mais il faisait du mieux qu’il pouvait. Dans un sens, rien qu’avec ces simples mots, il avait trahi son camp. Le jeune homme se releva. Il ne pouvait pas rester sur le sol, et lui donner autant d’ascendant sur lui. Difficilement, il se releva pour lui faire face une nouvelle fois.

– Détruisez-moi. Tuez-moi. Ca ne vous empêchera pas de tout perdre un jour ou l’autre. Vous ne resterez pas sur votre trône très longtemps.

Peut-être qu’il aurait dû se taire, mais il avait besoin de se protéger. Si ces paroles étaient inconscientes, elle lui donnait un semblant de courage, quelque chose pour réchauffer son cœur, quelque chose qui l’aiderait peut-être à ne pas être complètement détruit émotionnellement et psychologiquement par ce monstre …

« La torture et la peur sont des choses étranges. Des forces qui vous secouent, au sens propre et au sens figuré. Vous vous révélez : un lâche ou un brave. » Etendu sur le sol, le visage contre le béton glacial, Tristan se tordait de douleur. Encore une fois, il subissait l’un des pires sortilèges jamais inventés dans le monde magique. Il ne savait même plus combien de fois elle l’avait soumis à cette torture physique. Il n’y avait plus rien dans son esprit, plus aucunes pensées. Il n’y avait pas la place. Car le jeune homme ne pouvait plus rien faire. Il était seul face à sa douleur. Seul face à quelque chose de bien plus grand, bien plus puissant que lui. Il avait l’impression qu’Indra était en train de casser chacun des os de son corps un à un, comme si elle lui enfoncer des poignards sur chaque parcelle de sa peau. Comme si elle lui déchirait ses muscles avec les dents. C’était une douleur qu’il n’aurait jamais pu imaginer, le genre de douleur à rendre fou une personne. Des larmes coulaient sur son visage, sa bouche était sèche, tout son corps tremblait, convulsait au rythme du sort que la mangemort lui faisait subir. Il était en train de crier. Il avait l’impression de s’époumoner, comme s’il n’avait jamais crié aussi fort de sa vie. La douleur était totalement insurmontable. Il n’y avait que deux mots qui circulaient dans son esprit encore et encore « tue moi ». A ce moment précis, son plus grand souhait était de mourir. Il se fichait que ce soit de la main d’Indra, du moment que son calvaire prenne fin. Il avait été stupide, et complètement inconscient. Il avait cru au début pouvoir maitriser la situation. Il avait pensé qu’il pourrait gagner du temps, la manipuler, la pousser dans une direction pour subir le moins de dommages possibles avant que l’ordre ne le retrouve. Il avait eu tort. Parce qu’il l’avait mis hors d’elle, et maintenant elle ne voulait qu’une seule chose : le voir souffrir, le voir hurler, peut-être même le voir la supplier. Alors qu’il pensait que la douleur était en train de diminuer, ou qu’il était en train de s’y habituer, elle était repartie de plus belle, l’entrainant dans un monde sombre. Son cerveau commençait à lui jouer des tours. Il ne voyait et ne vivait que par la douleur. Sa voix se cassa après un énième hurlement de douleur. Tous ses muscles étaient à vifs. Cette impression de se faire arracher la peau couche par couche lui donnait envie de vomir, envie de mourir. Et alors qu’il pensait que c’était réellement la fin, qu’il pensait qu’il ne pouvait pas en prendre d’avantage, que son corps allait le lâcher avant que son esprit le fasse, le sort s’arrêta. Il ne fut pas totalement libéré pour autant. Son corps était désormais affaibli, à vif, à cause d’une douleur lancinante qui venait et qui repartait. Le jeune homme essuya ses larmes d’un revers de manche. Il devait retrouver le courage de se relever. Au moins cela. Parce que s’il devait mourir ici avec Indra, il ne voulait pas mourir en tant que lâche. Se remettre sur pieds fut terrible. C’était comme s’il ne maitrisait presque plus son corps, comme s’il n’était qu’un amas de muscle et d’os. Mais il était désormais debout face à elle. Il la regarda dans les yeux, tandis que sa baguette magique était toujours pointée sur lui. Et elle approcha de lui, il n’eut même pas le temps de reculer qu’il reçut un violent coup de poing dans l’estomac. Coup qui le mit à genoux. Même s’il avait voulu se relever, il sentait qu’il n’en était pas capable maintenant. Il pouvait se battre tant qu’il voulait pour survivre, mais ses pieds ne le porteraient pas plus longtemps. Surtout si elle ne lui donnait pas un peu de répit. Elle voulait un nom maintenant. Evidemment. Comment avait-il pu croire qu’elle le laisserait tranquille une fois qu’il lui avait dit qu’ils avaient eu des informations de l’intérieur. A genoux devant elle, la tête baissée et le regard vers le sol, Tristan sentit toute la terreur monter en lui. S’il ne disait rien, elle allait continuer. S’il ne disait rien, elle allait le frapper, le torturer, lui infliger une douleur à rendre fou. Il était terrorisé désormais. Par la peur de ce qui pouvait lui arriver s’il ne parlait pas. Il n’y avait qu’elle et lui. Et s’il voulait vivre, il n’avait pas le choix.

– Fimmel. Il m’a donné ces informations sur la moitié des personnes de votre camp pendant une mission. Il ne voulait pas finir à Azkaban. On a signé un compromis : des informations en échange de sa liberté.

Répondit Tristan d’une voix faible et tremblante. Il lâchait tout. Parce qu’il ne pouvait pas encaisser un coup de plus maintenant. Parce que l’instinct de survie était plus fort que tout, et qu’il n’était pas prêt à mourir sous le coup de la douleur. Pas aujourd’hui, pas dans cette cave où personne ne pourrait le retrouver si Indra le terminait. Il avait été encore plus stupide de la défier, de lui faire comprendre qu’elle allait tout perdre un jour ou l’autre, que la roue allait tourner. Parce qu’elle venait maintenant de lui attraper les cheveux, lui tirant violemment avant de lui faire la promesse de le détruire. Elle allait lui faire perdre la raison. Et il ne doutait pas de ses capacités. Parce qu’elle avait l’avantage sur lui, et que maintenant, elle était bien plus forte mentalement. Elle avait le pouvoir, le dessus, et elle pouvait faire de lui ce qu’elle voulait. Le fait qu’il en est conscience était sans doute le pire. Il était étrange de décrire les pensées et émotions du garçon en ce moment. Il avait l’impression de tout perdre, et de se perdre lui-même. Il avait l’impression que sa vie était réduite à néant. Il était coincé dans un endroit où il était la créature d’une mangemort sans cœur et sans âme, prête à tout pour lui faire du mal. Il avait pensé pouvoir se relever, et la défier. Mais il ne pouvait plus. Parce qu’elle lui avait fait comprendre une chose : elle était supérieure. Il allait perdre. Ils allaient tous perdre. Lui, et l’ordre. Parce que les mangemorts avaient quelque chose qu’ils n’avaient pas. Parce qu’ils étaient capables du pire. Ils pouvaient tuer, torturer, kidnapper. Ils pouvaient les détruire. Ils ne jouaient pas avec les mêmes règles. Parce qu’ils n’avaient aucunes limites. Et cela allait tous les mener à leur perte. Ils ne pouvaient pas rivaliser avec le mal sans dépasser cette limite qui faisait pour l’instant d’eux « les gentils ». Réaliser qu’une victoire était impossible était terrible. Tout ce qu’il avait mené, tout ce qu’il avait sacrifié, tout le temps qu’il avait pris pour s’impliquer pour une cause et pour un idéal … Tout cela pour se rendre compte qu’il n’y avait pas d’issue. S’ils voulaient gagner, ils allaient devoir utiliser les mêmes armes que les mangemorts. Dans tous les cas, ils perdaient : soit la guerre, soit leur âme.

Mais la jeune femme lui tenait toujours les cheveux fermement, et elle le tourna pour qu’il fasse face à cette cage qu’elle venait de faire apparaître. Le visage du jeune homme se décomposa : mélangeant terreur et détresse. Cette voix dans sa tête hurlait. Et ses yeux se remplirent à nouveau d’eau. Elle le tira à l’intérieur, sans qu’il puisse réellement résister. Elle le lâcha violemment sur le sol. Et le jeune homme se précipita contre les barreaux. Comme s’ils allaient disparaître s’il les touchait. Indra était face à lui, laissant glisser sa baguette contre les barreaux. Elle lui expliqua qu’elle avait eu cette idée : une cage très spéciale faisant perdre tout espoir à la personne enfermé dedans. Elle s’approcha d’avantage, pour lui faire entendre qu’elle aurait ses réponses, et lui annonça qu’ils allaient se voir dans quelques jours.

– NOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOOON.

Hurla-t-il de toutes ses forces. Mais sans même un autre regard, la jeune femme disparut, le laissant seul dans cette pièce glauque et glaciale. Le jeune homme commença à paniquer. Il secoua les barreaux de toutes ses forces. Donnant des coups pour essayer de s’enfuir, comme si cela allait faire quoi que ce soit … Sa respiration se faisait haletante. Mais alors qu’il tentait désespérément (c’était le cas de le dire) de sortir de cet endroit, il comprit bien vite la spécialité de cette cage. Elle était en train de rétrécir. Il ne voulait pas rester ici, il ne voulait pas rester seul. Son esprit lui jouait des tours, comme si le fait qu’il soit avec Indra dans cette pièce était moins pire que d’être seul. Après des heures à s’épuiser pour rien, le garçon se laisse retomber sur le sol. Sa cage avait déjà rétréci de moitié. S’il continuait comme cela, il risquait de finir écrasé par les barreaux avant même que la mangemort ne revienne le voir.

Cette torture était insupportable. Tristan avait perdu toute notion de temps et bientôt, il n’avait plus aucune idée du temps qui avait passé. Des minutes, des heures, des jours ? Tellement de pensées lui avait traversé l’esprit. Il avait revu Destiny, sa sœur, sa famille, il l’avait imaginé morte, il l’avait imaginé en vie, en train de le rechercher, il l’avait imaginé en vie mais le détestant, choisissant de le laisser à son propre sort comme une vengeance de ce qu’il lui avait fait subir. Et la cage avait rétrécit encore et encore. Et il avait hurlé à la mort, il avait crié pendant des heures le nom d’Indra, et puis il avait pensé à une solution pour sortir d’ici en vie. Tellement de pensée, tellement de stupidités. Quand des minutes ressemblaient à des heures, quand on devenait fou à attendre que quelqu’un vienne. Quand on était simplement livré à nous-mêmes dans la terreur et dans le froid. Il ne savait pas combien de temps avait passé. Mais le jeune homme était désormais recroquevillé sur lui-même. Les mains sur ses oreilles, il se balançait d’avant en arrière, comme pour se bercer. Et il laissait une mélodie filait entre ses dents. Il n’y avait pas de paroles, juste ces quelques notes, qu’il répétait inlassablement. Comme s’il essayait à tout prix de s’empêcher de penser, ou peut être simplement parce qu’il était en train de devenir totalement fou. Tout stoppa d’un coup. La mélodie s’évanouit, comme stoppé dans son élan. Le jeune homme ouvre les yeux, un regard vide de toute émotion. Un regard effrayant pour quiconque connaissait Tristan. Pas qu’il fasse peur, mais c’était comme s’il était totalement vide. Comme s’il n’y avait plus personne à l’intérieur.

– TUE MOI.

Deux mots. Un hurlement. Il ne savait pas si elle pouvait entendre, et pourtant il était en train de s’époumoner pour lui envoyer un message. Il voulait qu’elle le rejoigne, et qu’elle fasse ce pour quoi elle l’avait capturé. Plus de faux-semblants, plus de faux courage, plus de manipulation. Il ne voulait plus qu’une chose de sa tortionnaire : qu’elle l’achève ici et maintenant.